L’histoire d’EDF

L’histoire d’EDF par EDF en 6 petites vidéos

Ces six vidéos ont été produites et diffusées par EDF sur sa chaîne Youtube en 2016. Elles présentent sur un ton lisse les grandes lignes de l’histoire de l’entreprise. Nous considérons que ces vidéos ont leur intérêt comme porte d’entrée pour comprendre les enjeux que portent EDF.

Cependant, n’oublions pas que, devenue Société Anonyme, elle est passée de Service Public à entreprise à but lucratif. Par conséquent, il nous semble raisonnable de croire que ces productions ont moins une vocation de vulgarisation historique que de communication promotionnelle.

Vous trouverez sous ces vidéos quelques critiques plus précise sur leur contenu.

Bon visionnage

Nos critiques

Le défaut principal de cette série de vidéos (du moins, si on la prend comme un outil d’information) c’est qu’elle ignore tous les aspects politiques de l’histoire de l’entreprise, et ce, depuis sa création.

 

Un consensus Socialiste

Vous êtes vous demandé, par exemple, ce à quoi faisait référence le « large consensus » qui dirige le secteur des énergies vers la nationalisation ?

D’abord, en Avril 1946, date la nationalisation de l’électricité et du Gaz[1], l’Assemblée Nationale est occupée à 27% par le Parti Communiste Français, et 26% par le Parti Socialiste (SFIO) (qui n’est pas encore celui de François Hollande), qui, ensemble représentent, au nom d’une gauche de rupture, 52% des sièges alors que la droite n’en occupe que 36% [2]  (le reste étant occupé par le Parti Radical composés de tendances de droite et de gauches).

De plus, cette gauche de rupture, majoritaire, applique le Programme d’Action de la Résistance du Conseil National de la Résistance (CNR)[3], rédigée surtout par la gauche, la droite trouvant, de manière générale, peu d’intérêt dans la pratique[4] et ne signant celui-ci précisément que pour se maintenir dans l’unité nationale et rompre avec Pétain[5] à la libération.

Ce consensus est donc très marqué politiquement, à gauche, et cela à une importance fondamentale pour comprendre son contenu : la Nationalisation, la démocratie dans les directions intégrant travailleur·euses et consommateur·rices[6], le statut des agent·es des secteurs concernés[7]. Tout ça n’arrive pas de manière naturelle, ce sont des conquêtes que l’on pourrait nommer socialistes sinon communistes.

 

Une « neutralité » coupable

De plus, jamais ne sont pesés les avantages et inconvénients, jamais ne sont expliqué les raisons et conséquences politiques de la filialisation, de l’internationalisation, la transformation en Société Anonyme, et donc, la constitution d’un capital et le versement de dividendes aux actionnaires, ce qui implique du profit, supprimant la notion de service public.

Ainsi, avons-nous vu naître les services dérivés[8][9] et les interventions autrefois gratuites devenir des prestations facturées[10], la sous-traitance des opérations de maintenance devient majoritaire (80%)[11][12] et curatives[13], l’apparition du service artificiel de fourniture qui crée l’illusion d’un choix pour justifier la nécessité de la concurrence alors que nous somme tous desservis par un même réseau[14].

Enfin, tout est prétexte aux éloges, EDF ne semble n’avoir jamais fait d’erreur et ni autre chose que de suivre une histoire toute tracée, naturelle ; que de répondre à ce qu’il est pudiquement commun d’appeler les défis de notre temps.

 

Une ressource inutile ?

Malgré l’importance du défaut que comportent ces vidéos, nous décidons de les diffuser, avec nos critiques, car elles représentent une entrée en matière et une base de connaissance minimale accessible et nécessaire pour commencer à se former sur le sujet de la gestion des énergies.

 

 


Références

[1] Loi n°46-628 du 8 Avril 1946 sur la nationalisation de l’électricité et du gaz, Journal Officiel de la République Française du 9 Avril 1946, page 2951.

[2] Composition de l’assemblée nationale constituante du 6 Novembre 1945 au 10 Juin 1946 suite aux élections du 21 Octobre 1945, rapportés par Laurent de Boissieu

[3] Ce jour de 1946 où la nationalisation de l’énergie a été décidée par l’Assemblée, 8 Avril 2016, l’Humanité.

[4] des programmes et des gauches (page 11), Le programme commun de la Résistance, des idées dans la guerre, Claire Andrieu, 1984, les Éditions de l’Érudit, ISBN 2-86816-005-0.

[5] Les quatre programmes communs, une lignée discontinue (page 19), idem

[6] Loi n°46-628 du 8 Avril 1946, Titre II, Article 20, JORF du 9 Avril 1946 (p. 2953).

[7] Loi n°46-628 du 8 Avril 1946, Titre VI, Article 47, JORF du 9 Avril 1946 (p. 2957).

[8] Le groupe EDF se lance dans les services de proximité, Nabil Wakim, 7 Février 2019, Le Monde

[9] EDF, les apprentis sorciers, Gilles Balbastre, série Service Public, 2006, produit par Point du jour. à partir de la 13ème minute.

[10] idem, à la moitié de la 15ème minute.

[11] idem, à partir de la 39ième minute.

[12] Le Point de vue de l’IRSN sur la sureté et la radioprotection du parc électronucléaire Français en 2010, La sûreté de l’exploitation en 2010 : les tendances, page 11, Rapport n°466 de la DSR, Institut de Radioprotection et de Sureté Nucléaire (IRSN).

[13] Sous-traitants du nucléaire : la sûreté de nos installation en question, Anne-Laure Jumet, 30 octobre 2019, France Culture

[14] Hercule, un pas de plus dans l’impasse des marchés de l’électricité, Titre 3.2, page 11, rapport Parole d’expert·e·s SUD-Énergie, Décembre 2020.