[Edito] Face à la flambée des prix de l’électricité, une seule solution : le retour aux tarifs réglementés

Article initialement paru dans le journal Informations Ouvrières.

L’explosion des tarifs de l’électricité frappe de plein fouet des millions d’usagers, partout en Europe. Les ménages sont étranglés, les collectivités territoriales peinent à payer le chauffage de leurs locaux et des écoles, certaines doivent fermer les piscines municipales, les petites entreprises ne peuvent plus payer les factures…

Mais cette flambée des prix n’a rien à voir avec le coût de production, elle est la conséquence de la fin des tarifs règlementés calculés sur le coût de production.

Car, si le prix sur le marché de gros a atteint 1000 euros le MWh, c’est que la manière dont les prix de l’électricité sont fixés en Europe est dépendante du prix du gaz, alors même que plusieurs pays comme la France produisent de l’électricité majoritairement sans avoir recours à des centrales au gaz. La logique du marché fait que les prix dépendent du coût de fonctionnement de la toute dernière centrale appelée en renfort pour répondre aux pics de consommation sur le réseau électrique. Et en général il s’agit d’une centrale à charbon ou au gaz. Ce qui fait que les prix de l’électricité s’indexent en fonction du prix du gaz, même si 99% de la production d’électricité n’en dépend pas. La flambée du prix de l’électricité est la conséquence du marché, et de la spéculation, ce n’est donc pas une fatalité !clarisse delalondre

L’explosion des prix de l’électricité, conséquence de la dérèglementation depuis 1996

On voudrait nous présenter cette hausse comme le résultat de la guerre en Ukraine … Si la guerre est un facteur d’accélération, il faut également rappeler que la hausse des prix s’élevait déjà à plus de 50% pour l’électricité, et à plus de 85% pour le gaz, depuis le début de l’ouverture aux marchés en France.

Depuis 1946, avec la nationalisation d’EDF, les tarifs de l’électricité étaient règlementés et identiques pour tous. Mais surtout ils résultaient d’un simple calcul sur le coût de revient de la production (nucléaire et hydraulique principalement), du transport et de la distribution de l’électricité en France, avec comme principe lié au service public, celui de ne faire aucun profit.

Pour le capital, cette conquête sociale était de trop et depuis 25 ans les attaques se multiplient :

– Depuis 1996 : 1ère directive européenne, en application du traité de Maastricht, qui permet l’ouverture à la concurrence de manière progressive. Parallèlement, les collectivités territoriales n’ont plus eu droit aux tarifs règlementés, les livrant à la concurrence des marchés privés, ce qui a conduit à l’augmentation faramineuse de leurs factures actuellement.

Mais pour accélérer davantage la libéralisation du marché de l’électricité, c’est le tarif règlementé lui-même, aujourd’hui réservé aux particuliers, qu’il fallait dérèglementer.

  • En 2010, la loi NOME impose un changement majeur dans le calcul des tarifs règlementés de vente (électricité et nucléaire) en les indexant partiellement sur le prix du marché européen ce qui revient aujourd’hui à une quasi-indexation sur le prix du gaz, les déconnectant des coûts réels de production.

C’est cette même loi qui oblige EDF à vendre à perte une part de la production d’électricité d’origine nucléaire, sous prétexte de ne pas favoriser les anciens monopoles.

De qui se moque-t-on ?

Face à cette situation le gouvernement Macron-Borne multiplie les appels à faire des petits gestes : « Dégivrer le congélateur et le réfrigérateur », « couvrir ses casseroles », « limiter l’usage du four », « baisser le chauffage », « éviter les déperditions de chaleur » (Le Parisien). Les 11 millions de précaires énergétiques, dont certains n’ont pas plus de 14 degrés chez eux en hiver apprécieront le conseil de limiter leur chauffage à 17 degrés … Nombreux sont les usagers qui limitent déjà considérablement leur consommation d’électricité car ils n’ont plus les moyens de payer leurs factures.

Il n’y a pas de fatalité à la hausse

Les tarifs réglementés même s’ils ont augmenté, existent toujours et dépendent des décisions politiques. La panique qui a saisi le gouvernement Macron-Castex face à la flambée des prix au début 2022, les a contraints à limiter la hausse à 4%. La société Iberdrola d’ailleurs propose à ses clients de revenir à EDF et aux tarifs réglementés : un comble !

Macron et les chefs d’état européens annoncent leur volonté de « réformer le marché » … mais pas d’en finir avec le marché ! C’est pourtant bien la sortie du marché qui est la seule solution, et le retour au monopole public comme en 1946.

Le retour aux tarifs règlementés pour tous, calculés sur le coût réel de production d’électricité en France, est la seule solution pour sortir de la spéculation et permettre le blocage des prix. Mais cela induit d’en finir avec tout profit capitaliste fait sur la production d’électricité.